OWNI http://owni.fr News, Augmented Tue, 17 Sep 2013 12:04:49 +0000 http://wordpress.org/?v=2.9.2 fr hourly 1 Youpi! Ils ont gagné? http://owni.fr/2010/03/22/youpi-ils-ont-gagne/ http://owni.fr/2010/03/22/youpi-ils-ont-gagne/#comments Mon, 22 Mar 2010 16:13:22 +0000 Emgenius http://owni.fr/?p=10632

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Un discours de triomphe modeste, mais un discours de triomphe quand même.

Ainsi donc, comme en 2004, la plupart des régions sont restées colorées de rouge. Et depuis hier les ténors avec ou sans twitter, de nous marteler qu’il s’agit d’un vote sanction de la politique du gouvernement à la tête de la république française.

Je n’ai pas voté pour la région île de France où je réside. Je ne peux pas. Je ne suis pas Français (un choix de fainéant, depuis que mon pays de racines, la Belgique a autorisé il y a six mois la double nationalité à ses ressortissants). J’ai entendu les arguments balancés par les futurs votants et les abstentionnistes dans #lafrancedutrain qui m’emmène chaque matin de Seine et Marne à Paris. On y parlait de la personnalité bonhomme de Huchon et du sourire coquin de Valérie Pécresse. Ou alors on parlait des résultats désastreux de Paris en championnat ou on ne parlait pas.

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J’ai reçu des tracts de Jean Paul Huchon à ma gare d’extrême Seine et Marne. J’ai vu aussi des poubelles pleines des mêmes tracts quelques mètres plus bas, dans le couloir qui mène au train. J’ai lu les batailles à coup de Ali Soumaré, les déclarations facebook de Frédéric Lefèbvre, j’ai entendu le triomphalisme de gauche demander la tête de François Fillon entre les lignes. Et si c’était Jean-Marie Le Pen qui avait eu la seule bonne analyse du scrutin en version 2010 « Le Pen, c’est une bonne marque, en laquelle les gens ont confiance ».

Et si le vote sanction, le vote épidermique qui permet d’excuser sinon d’expliquer les revirements complets de l’opinion publique n’étaient en fait que le reflet du monde contemporain ?

Combien sont-ils, les petites gens à mon image ? Ceux qui luttent autant pour le pouvoir d’achat au quotidien que pour l’écran plat ? Ceux qui ne noieraient pas leur prochain dans l’eau d’un bain de merde, mais seraient prêts à gueuler si les voisins se mettent à marcher sur les plates bandes ? Combien sommes-nous à conchier  les extrêmes de tout bord sans pour autant soutenir d’idéal ni de droite ni de gauche. Combien sommes-nous à voter, ou ne pas voter, par habitude ?

Parce que les préoccupations politiciennes nous semblent à ce point éloignées de nos quotidiens que nous avons l’étrange impression qu’un système vaut bien l’autre. Qu’on ne sera jamais tous frères unis sous le drapeau rouge, mais pas dupes non plus de lois votées au profit de certains, sous le couvert de la réponse à un fait divers, une préoccupation sociale. Et je me souviens à 17 ans, de ce gros couillon qui fustigeait ses camarades de classe donnant leur vote à la pensée paternelle sans réfléchir à l’idéologie, au monde qu’ils désiraient pour plus tard. Je suis pire qu’eux. J’ai abdiqué. Je survis. J’envie. Je possède et constate.

L’économie quotidienne. La tambouille dans la gamelle de tous les jours et l’hédonisme capitaliste ont depuis longtemps remplacé notre préoccupation politique.

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On veut tous plus. On veut tous mieux. Et tant pis si parfois on doit faire taire l’internationale socialiste qui chante au fond de nos cœurs. Les vacances aux Maldives valent bien quelques grammes de C02, et on ne se priverait pas du café à la machine parce qu’il est servi dans un gobelet plastique. On veut bien être un peu justes, mais pas jusqu’au point de partager nos appart’s avec tous les miséreux du monde. On veut bien accueillir les réfugiés politiques, mais à la seule condition qu’ils n’habitent pas à 15 dans la maison mitoyenne, qu’ils évitent les ablutions matinales sonores et les odeurs de friture insupportables. On veut bien être socialistes, mais pas au point de nourrir tous les tire au flanc, que parfois on envie, le soir quand on est crevé par la journée de boulot, la grève SNCF ou le trafic à la sortie de la méga-ville.

La politique n’est plus au mieux, qu’un outil de notre développement personnel. Au pire une habitude ou un sujet de conversation. Nous sommes volatiles, changeants, inconsistants. Nous sommes capables de sacrifier un idéal au gré de notre ambition personnelle. Nous sommes près à tous les compromis parce qu’ils servent notre cause propre ou perpétuent notre consensus mou.

Nous pensons la politique en terme de phrases assassines, de discours grand guignolesques ou de spiritualité sur Twitter.

Un casse-toi pauvre con et nous sommes capables de causer six heures avec nos collègues. Un désir d’avenir et notre journée numérique est enjouée à coup de retweet.

Nous avons la vague impression que quelque chose ne va pas. Nous voudrions que l’île de sacs plastiques au milieu de l’Atlantique soit nettoyée, mais ne serions pas prêts à être taxé pour le nettoyage à sec. Nous votons pour les chaussures de Nadine Morano, la petite marche de Nicolas Sarkozy, la serpillère flasque de Van Rompuy ou le nœud papillon d’Elio di Rupo.

Notre conscience politique se construit autour d’un clip « pour ceux qui veulent changer le monde » et d’un bon mot des guignols. Notre idéologie se développe pour Stéphane Guillon ou contre lui. Nous nous en foutons royalement (sans jeu de mot), tant que rien n’empêche les courses chez H&M, le caddie chez Intermarché et les vacances au mois d’Août.

Nous avons la conscience diffuse que quelque chose ne va pas, ne va plus, n’a jamais été. Cohn Bendit représente la génération de l’échec des idéaux, mais nous n’avons pas d’idéaux. Besson ou Strauss Kahn la preuve qu’on peut être de gauche sans finir professeur d’histoire à collier de barbe. Saint Sega priez pour nous. Et priez, priez que tous nous veuille absoudre.

On aimerait changer le monde, mais notre temps de cerveau disponible est restreint, une fois achevée la lutte pour notre propre survivance et le visionnage de la saison 6 de Docteur House. On aimerait que quelqu’un le change à notre place, par baguette magique et qu’on puisse tous en profiter, y faire des profits. Boire le café à la machine le matin et continuer à respirer correctement, parce qu’on est les pères de nos enfants. On aimerait donner notre destin à un guide, un despote éclairé. Mais on n’a pas confiance en les icônes politiques, qui tournent au vent des électeurs comme des girouettes.

On a l’impression de devoir prendre le destin du monde en main, mais on a déjà du mal à se saisir du nôtre. Et on a peur d’être roulés dans la farine alors on évite de se commettre à adorer une icône politico médiatique qui sera balayée plus tard par une affaire, un revirement ou un mauvais mot glosé par les humoristes.

Nous sommes défiants

C’est là notre seule conscience politique. On sait qu’on ne se fera plus avoir par le politique. Alors on se fait avoir par l’économique. Saint Sega priez pour nous . Et soumets-nous à la tentation. On se rassure en écoutant les radios qu’on imagine colorées à peu près à notre goût et les trublions de bon ton. Nous oublierons. Nous serons prêts à contourner les lois, défier les dogmes si seulement l’économie nous offre une drogue légale. Here we are now, Entertain us, comme disait l’autre.

Parce que quand on se met à penser on pleure. Parce que devant l’ampleur des tâches on se rend compte de nos différends, de nos différences, et de ce qu’on n’aura pas assez d’une vie pour que tout change à notre rythme mollasson.

Nous votons par habitude, ou nous ne votons pas. Ou pire nous votons pour la marque électoraliste qui nous tente le plus. Le Pen a raison (dit comme ça ça fait peur… toi qui pratique la culture de l’extrait remonte plus haut je t’en supplie). Nous choisissons notre préférence électorale plus en fonction des idées, mais en fonction du catalogue, de la vitrine que propose le candidat. Une poitrine avenante, un regard mutin peuvent amener plus de voix qu’un vrai programme dûment calibré. Je vous jure avoir entendu peu avant l’élection de 2007 dans #lafrancedutrain « sarko il gagnera pas, il est trop petit pour faire un président». Quelques bons mots sur Twitter et @benoithamon m’enthousiasme plus que Martine Aubry.

Un site internet pourri ou le rappel opportun d’une opposition ancienne avec le Club Dorothée et c’est une élue de Poitou Charentes qui fait les frais de notre courroux. Un Yann Arthus Bertrand par hasard programmé la veille du scrutin et c’est le monde qui devient écologiste d’un soir. Un policier abattu dans l’exercice de ses fonctions et nous sommes tous profondément convaincus que le monde ne tourne plus rond et qu’il faut resserrer les boulons.

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Quand la victoire est une question de plus’ produit

Nous sommes citoyens d’une méga-ville planétaire. Qu’une explosion se passe sur le pont d’à côté, et nous ne croirons à sa véracité que si le présentateur vedette nous le confirme. Qu’on pense révolution et on se pique de regarder exactement sur quel point de détail du discours de l’UMP on peut porter un estoc parce que sur le fond, on n’est pas si différents. Qu’on soit de gauche et il faut en porter la coquarde : « libé-Guillon-FranceInter » ou de droite « costard, cheveu beatles et microentreprise.

On ne vote plus sur foi d’idées ou de concepts, parce qu’on a la diffuse impression que les concepts ne changent plus le monde et qu’un concept sera toujours moins puissant que l’économie. Et que de l’économie dépend Saint Sega. On vote sur catalogue. On choisit sa marque électorale comme on choisirait un Jean dans un catalogue de La Redoute. Parce qu’il est pas cher, parce qu’il fait le cul rond ou que l’air du mannequin donne envie de lui mettre une cartouche. On applique à notre philosophie, à nos actes, des mécaniques économiques marketing/envie/acte d’achat sensibles aux saisons, à l’ADN de la marque et à la publicité. Notre culture, notre conviction politique est un catalogue France Loisir.

On y picore ce qui nous est bien présenté. Et on s’engage à bien lire chaque mois un morceau de la culture qu’on nous ressemble, que quelqu’un un jour a formaté pour qu’il nous ressemble…. L’économie a non seulement remplacé l’idéal politique, mais il y plaque aujourd’hui ses mécaniques.

Donner des leçons c’est bien…

Mais je n’ai ni le courage ni l’envie de me lancer dans une croisade pour un retour de la prise en main de nos réflexions politiques, pour le retour de la conviction philosophique avant le glamour du glissement du bulletin dans l’urne. Je n’ai pas le temps.

Comme tout le monde je galère d’abord avec l’envie de me payer un resto par mois en famille et des vacances à la côté cet été. Comme tout le monde je m’émeus du ministère de l’identité nationale et m’amuse des spots de campagne blafards du PS. Comme tout le monde si j’allais voter, je choisirais mon candidat sur catalogue (je le fais déjà pour les élus belges que je dois choisir à distance).

Avant j’imaginais que pour éviter que le titanic se mange l’iceberg, il fallait que je grimpe à bord et que je convainque le capitaine. Aujourd’hui je suis plus enclin à rester sur la rive tirer dessus au bazooka, et préparer les chaloupes pour sauver qui pourra. Sauf que… être belliqueux c’est pas classe, et je me vois pas négocier en loucedé l’achat et le montage de mon bazooka. Pas le temps pour ces conneries, y’a Breaking Bad S03E01.

Vivent les régions à gauche ?

> Article initalement publié sur le coin d’Emgenius dans la soucoupe

> Illustrations by mainblanche et par alainalele

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Le Cluetrain Manifesto appliqué à la politique http://owni.fr/2010/03/19/le-cluetrain-manifesto-applique-a-la-politique/ http://owni.fr/2010/03/19/le-cluetrain-manifesto-applique-a-la-politique/#comments Fri, 19 Mar 2010 13:33:30 +0000 Damien Van Achter http://owni.fr/?p=10391 2406305116_3d49243f6c

Image CC baratunde sur Flickr

Le Cluetrain Manifesto ( en français, Le manifeste des Évidences) est un petit peu la bible du  nouveau web. Sorties en 1999 par Levine, Locke, Searls & Weinberger, ces 95 affirmations sont autant de clés fondamentales pour comprendre les changements de mentalité que le web provoque, de gré ou de force, au sein des entreprises.

Une seule chose compte: l’utilisateur. C’est lui qui désormais mène la danse, fût-elle encore un peu folklorique :-)

Depuis que je blogue, j’ai relu à maintes reprises ce Cluetrain. Comme toutes les évidences, il faut avoir souvent enfoncé le clou pour se rendre compte de la puissance du marteau. Il y a trois ans, sentant un peu le vent venir, je m’étais attelé à transcrire à l’échelle de la politique les 95 thèses développées dans le Manifeste.

Amis français, vous qui allez voter dimanche, je crois que la lecture des quelques lignes ci-dessous devraient vous mettre en joie. Ou pas…

Électeurs connectés …

Les électeurs connectés commencent à s’organiser plus vite que les partis et les organismes politiques qui les ont traditionnellement ciblés. Grâce au web, ces électeurs deviennent mieux informés, plus intelligents et plus demandeurs en qualités, qui font défaut à la plupart des partis et organismes politiques.

… Les habitants de la Terre

Le ciel s’ouvre sur les étoiles. Les nuages passent au dessus de nous, jour et nuit. Les marées montent et descendent. Quoi que vous ayez pu entendre, ceci est notre monde, notre lieu d’être. Quoi qu’on ait pu vous dire, nos drapeaux volent librement au vent. Notre coeur bat à jamais. Habitants de la Terre, souvenez vous en.

95 thèses

1. Les collèges électoraux sont des conversations.

2. Les collèges électoraux sont constitués d’êtres humains, non de secteurs démographiques.

3. Les conversations entre humains sonnent de façon humaine. Elles sont menées sur un ton humain.

4. Que ce soit pour discuter d’information, d’opinions, de perspectives, d’arguments opposés ou humoristiques, la voix humaine est typiquement ouverte, normale, et naturelle.

5. Les gens se reconnaissent entre eux grâce au son même d’une telle voix.

6. L’Internet permet des conversations entre êtres humains qui étaient tout simplement impossibles à l’ère des masse-média.

7. Les hyperliens renversent la hiérarchie.

8. Au sein des collèges électoraux interconnectés, et des électeurs intraconnectés, les gens se parlent entre eux d’une  nouvelle façon puissante.

9. Ces conversations en réseau permettent à de nouvelles formes d’organisation sociale et d’échange de connaissance d’émerger.

10. Résultat, les électeurs deviennent plus intelligents, plus informés, plus organisés… La participation à un collège électoral en réseau change des gens fondamentalement.

11. Les électeurs en réseau ont compris qu’ils obtiennent des informations et une aide bien meilleures les uns des autres que des politiques. Autant pour la rhétorique corporatiste des partis pour ce qui est d’ajouter de la valeur à des sujets d’intérêts politiques d’intérêt général.

12. Il n’y a pas de secrets. Les électeurs connectés en savent plus que les partis sur les sujets politiques. Et que ce qu’ils découvrent soit bon ou mauvais, ils le répètent à tout le monde.

13. Ce qui arrive au sein des collèges électoraux se passe également parmi les électeurs. Une construction métaphysique appelée « le parti » est la seule chose qui les sépare.

14. Les partis politiques ne parlent pas dans la même langue que ces nouvelles conversations en réseau. Pour leurs audiences en ligne, les partis politiques semblent creux, plats et littéralement inhumains.

15. Dans quelques années à peine, l’actuelle voix homogène des politiques – le son des rapports de mission et des brochures – semblera aussi forcée et artificielle que le langage du 18ème siècle à la cour de France.

16. Déjà, les partis et les organismes politiques maniant boniment et charlatanisme, ne parlent plus à personne.

17. Les partis et les organismes politiques qui supposent que les électeurs en ligne sont les mêmes que ceux qui regardaient leur publicité à la télévision se moquent d’elles-mêmes.

18. Les partis et les organismes politiques qui ne réalisent pas que leurs collèges électoraux sont désormais un réseau d’individus à individus, plus intelligents par conséquence et très impliqués dans un dialogue, passent à côté de leur meilleure chance.

19. Les partis et les organismes politiques peuvent maintenant communiquer avec leurs électeurs directement. Si elles passent à côté, cela pourrait être leur dernière chance.

20. Les partis et les organismes politiques doivent réaliser que leurs électeurs rient beaucoup. D’eux.

21. Les partis et les organismes politiques devraient se détendre et se prendre un peu moins au sérieux. Elles ont besoin d’un sens de l’humour.

22. Avoir le sens de l’humour ne signifie pas mettre des blagues sur le site web du parti. A l’inverse, cela implique de grandes qualités, un peu d’humilité, du franc parler, et un véritable point de vue.

23. Les partis politiques et les organismes essayant de se positionner devraient avoir un positionnement. Dans l’idéal, il correspond à quelque chose qui intéresse vraiment leur collège électoral.

24. Les fanfaronnades ampoulées du genre « nous sommes en position pour devenir le principal fournisseur de XYZ » ne constituent pas un positionnement.

25. Les partis et les organismes politiques doivent descendre de leurs tours d’ivoire et parler avec les personnes avec lesquelles elles espèrent instaurer une relation.

26. Les relations publiques ne parlent pas au public. Les partis et les organismes politiques ont profondément peur de leurs collèges électoraux.

27.En s’exprimant dans un langage qui est distant, peu attrayant, arrogant, ils bâtissent des murs pour maintenir à distance leurs collèges électoraux.

28. La majorité des programmes électoraux sont fondés sur la crainte que les électeurs puissent voir ce qui se passe réellement à l’intérieur du parti.

29. Elvis le dit mieux : “Nous ne pourrons pas continuer avec un esprit soupçonneux”

30. La fidélité politique est la version politique de ne rien faire, mais la rupture est inévitable – et arrive vite. Parce qu’ils sont connectés, les collèges électoraux sont capables de réévaluer une relation en un clin d’oeil.

31. Les collèges électoraux en réseau peuvent changer de sujets d’intérêt du jour au lendemain. Les activistes en réseau peuvent changer de parti pendant le déjeuner. Vos propres conduites nous ont enseignés à nous poser la question : « la loyauté ? c’est quoi déjà ? »

32. Les collèges électoraux futés trouveront les francs-tireurs politiques qui parlent leur propre langue.

33. Apprendre à parler d’une voie humaine n’est pas un truc de parloir. Cela ne s’apprend pas au cours d’une quelconque conférence.

34. Pour parler avec une voix humaine, les partis politiques doivent partager les centres d’intérêts de leurs communautés.

35. Mais avant tout, elles doivent appartenir à une communauté.

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36. Les partis et les organismes politiques doivent se demander où s’arrêtent leur culture interne.

37. Si elle s’arrête avant que la communauté commence, elles n’auront aucun collège électoral.

38. Les communautés humaines sont basées sur le dialogue- sur des dialogues humains concernant des préoccupations humaines.

39. La communauté du dialogue est le collège électoral.

40. Les partis et les organismes politiques qui n’appartiennent pas à une communauté du dialogue sont condamnés.

41. Les partis et les organismes politiques voue un culte à la sécurité, mais c’est pour brouiller les pistes. La plupart se protège moins de leurs concurrents que de leur propres collège électoral et activistes.

42. De même que dans les collèges électoraux en réseau, les gens parlent également entre eux directement à l’intérieur du parti — et pas uniquement à propos des règles et régulations, des directives du comité central et des scores électoraux.

43. De telles conversations ont lieu aujourd’hui sur les intranets politiques. Mais seulement quand les conditions sont réunies.

44. Les partis et les organismes politiques installent généralement des intranets de haut en bas pour diffuser des consignes et autres informations internes que les activistes font de leur mieux pour ignorer.

45. Les intranets ont naturellement tendance à devenir barbants. Les meilleurs sont construits de la base vers le haut, par des individus engagés, coopérant dans le but de construire quelque chose avec plus de valeur.

46. Un Intranet sain organise les activistes dans tous les sens du terme. Son effet est plus radical que l’ordre du jour de n’importe quel syndicat.

47. Bien que cela terrifie les partis politiques, ils ont également largement besoin d’intranets ouverts pour générer et partager des informations critiques. Elles doivent résister à l’envie d’améliorer ou de contrôler ces conversations en réseau.

48. Quand les intranets des partis ne sont pas bloqués par la peur et les règles juridiques, le type de conversation qu’ils favorisent, résonnent remarquablement comme les conversations des collèges électoraux.

49. Les diagrammes organisationnels fonctionnaient dans une ancienne économie, où les plans pouvaient être totalement compris au plus haut de la pyramide manageuriale et que des ordres de travail précis pouvaient alors être donnés vers le bas.

50. Aujourd’hui, la charte organisationnelle est hyperliée, et non hiérarchique. Le respect pour la transmission de la connaissance est bien plus fort que celui pour une autorité abstraite.

51. Le management du style commander-et-contrôler vient de et renforce la bureaucratie, la lutte du pouvoir et une culture globale de la paranoïa.

52. La paranoïa tue le dialogue. C’est son but. Mais le manque de dialogue peut tuer un parti.

53. Il y a deux sortes de dialogues en cours. Un à l’intérieur du parti. Un avec les électeurs.

54. Dans la plupart des cas, aucun des deux ne se passe très bien. Pratiquement à chaque fois, la cause de l’échec peut être ramenée à des notions obsolètes de l’autorité et du contrôle.

55. En tant que politiques, ces notions sont du poison. En tant qu’outils, elles ne marchent pas. L’autorité et le contrôle rencontrent l’hostilité des acivistes intraconnectés et génère une méfiance parmi les électeurs interconnectés.

56. Ces deux conversations veulent dialoguer l’une avec l’autre. Elles parlent le même langage. Elles se reconnaissent mutuellement.

57. Les partis et organismes politiques futés se pousseront et aideront l’inévitable à arriver plus vite.

58. Si la volonté de se mettre de côté était un critère d’évaluation du QI, alors très peu de partis politiques sociétés seraient dans le coup.

59. Aussi subliminal que cela soit sur le moment, des millions de personnes en ligne perçoivent maintenant les partis politiques comme à peine mieux que de pittoresques fictions légales qui font de leur mieux pour éviter que ces conversations ne se croisent.

60. C’est suicidaire. Les électeurs veulent parler aux partis politiques.

61. Malheureusement, la partie du parti à laquelle les électeurs connectés veulent s’adresser, est généralement cachée derrière un écran de fumée de boniments, d’un langage qui sonne faux, et qui généralement, l’est.

62. Les électeurs ne veulent pas parler aux portes-parole. Ils veulent participer aux conversations ayant cours de l’autre côté du mur d’enceinte du parti.

63. Se mettre à nu, être personnel. Nous sommes ces collèges électoraux… Nous voulons vous parler.

64. Nous voulons accéder à votre information interne, à vos plans, vos stratégies, vos meilleurs projets, votre sincère connaissance. Nous ne nous contenterons pas d’une brochure en couleurs, d’un site web plein à craquer de poudre aux yeux mais sans aucune substance.

65. Nous sommes également les militants de bases qui font fonctionner vos partis politiques. Nous voulons parler aux électeurs directement de notre propre voix et non selon des platitudes écrites dans un manifeste.

66. En tant qu’électeurs, que militants, nous n’en pouvons vraiment plus d’obtenir notre information via des télécommandes. Quel besoin avons-nous d’assemblées annuelles impersonnelles et de sondages électoraux de troisième ordre pour nous présenter les uns aux autres ?

67. En tant qu’électeurs, que militants, nous nous demandons pourquoi vous n’écoutez pas. Vous avez l’air de parler dans une autre langue.

68. Ce jargon autosuffisant que vous jetez alentours – dans la presse, à vos conférences – en quoi ça nous concerne ?

69. Peut-être vous impressionnez vos donateurs. Peut-être vous impressionnez Euronext. Vous ne nous impressionnez pas.

70. Si vous ne nous impressionnez pas, vos donateurs en seront de leur poche. Est-ce qu’ils ne peuvent pas comprendre cela ? S’ils le comprenaient, ils ne vous laisseraient pas nous parler ainsi.

71. Vos notions fatiguées de l’ »électorat » rendent vos yeux ternes. Nous ne nous reconnaissons pas dans vos projections. Peut-être parce qu’on est déjà allé voir ailleurs.

72. Nous aimons beaucoup ce nouvel espace électoral. En fait, nous le créons.

73. Vous êtes invité, mais c’est notre territoire. Laissez vos chaussures à l’entrée. Si vous voulez trinquer avec nous, descendez de votre cheval !

74. Nous sommes immunisés contre la propagande. Laissez tomber.

75. Si vous voulez nous parler, dites-nous quelque chose. Et quelque chose d’intéressant, pour une fois.

76. On a des idées pour vous aussi : de nouveaux outils dont nous avons besoin, de meilleurs propositions. Des propositions pour lesquelles nous sommes prêts à voter. Vous avez une minute ?

77. Vous êtes trop occupés à « faire de la politique » pour répondre à notre email ? Zut, désolé, on reviendra plus tard. Peut-être.

78. Vous voulez notre vote ? Nous voulons votre attention.

79. Nous voulons que vous arrêtiez votre trip, votre névrotique attention sur vous-même, venez faire la fête.

80. Ne vous inquiétez pas, vous pouvez encore gagner des voix. Enfin, à condition que ce ne soit pas votre seul soucis.

81. Avez-vous remarqué que l’argent en soi, est un peu unidimensionnel et ennuyeux ? De quoi d’autre pourrait-on parler ?

82. Vos discours ne touchent plus personne. Pourquoi ? On aimerait interroger les personnes qui les ont rédigés. Votre stratégie politique n’a aucun sens. Nous aimerions en discuter avec votre président. Comment ça, il n’est pas là ?

83. Nous voulons que vous preniez vos dizaines de milliers d’électeurs autant au sérieux qu’un seul journaliste du Soir.

84. On connaît des gens dans votre parti. Ils sont plutôt sympas en ligne. Vous en avez d’autres comme ça que vous cachez ? Est-ce qu’ils peuvent sortir pour venir jouer ?

85. Lorsque nous avons des questions, nous nous tournons les uns vers les autres pour obtenir des réponses. Si vous n’aviez pas une main si dure sur « vos gens » peut-être que nous nous tournerions vers eux.

86. Lorsque nous ne sommes pas occupés à être votre « cible électorale », la plupart d’entre nous sont vos gens. Nous préférions discuter avec des amis en ligne, plutôt que de regarder l’heure. Cela diffuserait votre nom d’une façon bien plus efficace que votre site web à un million d’euro. Mais vous nous dites que s’adresser aux électeurs est réservé aux porte-parole.

87.Cela nous ferait plaisir que vous compreniez ce qui se passe ici. Ce serait vraiment bien. Mais ce serait une grave erreur que de croire que nous allons vous attendre.

88. Nous avons de meilleures choses à faire que de nous soucier de savoir si vous allez changer à temps pour conquérir nos voix. Les élections ne sont qu’une partie de nos vies. Elles semblent remplir complètement la votre. Réfléchissez-y : qui a besoin de qui ?

89. Nous avons un vrai pouvoir et nous le savons. Si vous ne saisissez pas le concept, une autre équipe va débarquer qui sera plus attentive, plus intéressante, plus sympa pour jouer avec.

90. Même dans le pire des cas, notre toute récente conversation est plus intéressante que la plupart des salons professionnels, plus divertissante que n’importe quelle série télé, et certainement plus proche de la vie que les sites web institutionnels que vous avons vus.

91. Notre allégeance va à nous-mêmes, à nos amis, à nos nouveaux alliés et connaissances, et même à nos adversaires. Les partis et organismes politiques qui n’ont pas de liens avec ce monde, n’y auront pas de futur non plus.

92. Les politiciens dépensent des milliards d’euros pour « lutter contre le terrorisme ». Pourquoi n’entendent-ils pas la bombe à retardement de cet électorat ? Les enjeux sont bien plus importants.

93. Nous sommes à la fois à l’intérieur et à l’extérieur des partis politiques. À l’intérieur et en dehors d’eux. Les barrières qui délimitent nos dialogues sont comme le mur de Berlin aujourd’hui, mais elles ne sont qu’un désagrément. Nous savons qu’elles finiront par tomber. Et nous allons nous appliquer des deux côtés, à les faire tomber.

94. Pour les partis traditionnels, les conversations en réseau peuvent sembler confuses, perturbantes et désarçonnantes. Mais nous nous organisons plus vite que vous ne le faites. Nous avons de meilleurs outils, d’avantages d’idées neuves, et aucun règlement pour nous ralentir.

95. Nous nous éveillons et nous connectons les uns aux autres. Nous observons. Mais nous n’attendons pas.

Billet initialement publié sur Blogging the news

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